Ne serait-ce pas par hasard le veau d'Hofmann ?
Un vent chaud soufflait en continu, soufflant sur le lac des vagues bleues, larges et régulières, sommées de crêtes d’écume argentée. La neige avait disparu, sauf au revers des combes où l’on voyait encore des taches blanches dans le jaune des prés. Les ruisseaux, gonflés d’eau de neige, débordaient de leur lit et descendaient en chantant vers le lac. On était en avril. La gente écolière dont je faisais partie, vivait avec plaisir, après un hiver long et rigoureux, les délices des vacances de Pâques.
Ce jour-là, vers une heure après midi, nous les gamins, organisions une partie de jeu pendant que les hommes prenaient l’air devant les maisons ou dans les jardins, humant l’odeur printanière qui montait de la terre. C’était leur habitude avant que de retourner s’asseoir devant l’établi d’horloger. Tout-à-coup un bruit de pas précipités se fit entendre sur la route. Un homme s’avançait rapidement. On reconnut Auguste de Groënroux. Que venait-il faire ici, à pareille heure, à pied et non à vélo selon son habitude ? Il arriva au milieu du rond d’hommes et de gamins qui s’était formé. Il était nue tête, le visage rougeaud en sueur, la chemise largement ouverte sur sa poitrine velue et les pantalons gris tire-bouchonnant sur des pantoufles d’horloger en lisières. Il s’arrêta, reprit son souffle et lança de sa voix sonore :
- Le veau à Hofmann…