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32. Jacques Tardi, Moi René Tardi, prisonnier de guerre au Stalag II B, mon retour en France, Casterman, 2014.

Publié le 23 décembre 2014 dans Littérature

Un album à découvrir.

    Voici un ouvrage fondamental, une BD de plus à l'actif de Jacques Tardi, dessinateur et scénariste génial, fils d'un déporté, petit-fils d'un poilu, obsédé par les deux guerres mondiales qui ont ravagé non seulement notre continent, mais des zones entière de notre pauvre planète. 
    La première guerre mondiale fut longtemps le terreau d'une partie importante de l'oeuvre de Jacques Tardi à qui l'on doit aussi ces albums bizarres constituant la série Adèle Blanc-Sec, où il excèle à dessiner le Paris d'autrefois. 
    Une première guerre mondiale que notre auteur remet sans cesse dans l'actualité, dessinant avec son trait si particulier toute l'horreur qu'elle a offert aux hommes qui ont eu la malchance de tomber dans cet immense bouillon que fut l'affrontement entre la France et l'Allemagne. Où l'individu n'est plus que chair à canon, et où les rescapés, même en bon état sur le plan pysique, ne seront plus jamais les mêmes sur le plan moral, détruits. Et ne parlons pas des autres, les gueules cassées, dont la suite de l'existence ne sera plus qu'une triste besogne où vous demeurez désormais à l'écart du monde. La patrie reconnaissante, ô dérision infâme! 
    Pour ce qui est de la seconde guerre mondiale, que Tardi a longtemps hésité à mettre en scène, nous retrouvons son père , prisonnier du Stalag IIB, le quittant avec tant d'autres de ses compagnons, pour désormais errer au coeur de cette Europe en feu. On fuit en fait l'armée rouge qui, après qu'elle ait été pillonnée par l'armée allemande, maintenant, reconstituée en ses arrières, fonce vers l'Allemagne où, on le sait, elle prendra bientôt Berlin. 
    C'est ainsi une longue colonne qui traverse cette partie de l'Europe, encadrée  des méprisables Posten, véritables bêtes humaines, accompagnés de leurs maudits chiens-loups, ces bergers allemands qui devaient acquérir en ces événements une réputation de férocité cauchemardesque. Et cette colonne, qui évite les grandes villes mais traverse néanmoins les petites cités, affamée, vit sur la région, pillant les fermes dont les occupants vont ainsi affronter des ennemis de tous les côtés. 
    On le sait, les prionniers, après qu'ils aient finalement liquidé leurs plus féroces gardiens, arriveront enfin sur un territoire conquis par les armées alliées. Chacun pourra alors, après une suite de péripéties diverses, rentrer au foyer, comme on dit. Avec pour certains cette constatation douloureuse, que le lit conjugal était depuis longtemps occupé! 
    Un ouvrage naturellement sinistre au vu de son contenu, mais révélateur, et ô combien, de cette période de guerre, l'une des plus atroce qu'ait pu connaître l'humanité, et Dieu sait si celle-ci, en tous temps et en tous lieux, ne fit pas dans la dentelle question bien être de ses dignes représentants! 
    Pauvres de nous!