Gustave Rochat en ses oeuvres.
Et il était bien, là, assis sur son banc, tranquille, oublieux du bas où le travail ne pressait pas, tout à son alpage, à la douce paix qui y régnait ainsi l’automne alors que le bétail était redescendu. On entendait parfois un coup de fusil dans les forêts, pas si loin que ça, et si ces abrutis allaient nous envoyer une décharge de plomb en pleine figure, maladroits comme ils sont, hein ? Il irait voir son chantier, où l’été passé ses commis lui avait monté de la sciure et des découpures de carton. C’est lui qui les avait faites quand il n’avait plus de boîtes à repétasser. Il prenait alors des cartons, restants du commerce, et avec de gros ciseaux, il le découpait en petits bouts qui prendraient place dans les lésines, sur les pierres, partout où il fallait absolument de l’humus pour recréer du terreau sur lequel pousserait enfin un jour une belle herbe.
- Vous verrez, nous avait-il dit, il y aura bientôt la place pour un demi-modzon de plus !
C’était insignifiant, que de vouloir faire de l’humus avec des bouts de carton. Mais cela lui était entièrement égal. Il avait tout son temps. Il avait même, on peut en avoir la certitude aujourd’hui, l’éternité devant lui.