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26. Cette Orbe qu'on assassine - 1962 -

Publié le 05 mars 2012 dans La Vallée dans tous ses états

L'Orbe telle qu'autrefois.

    Redresser le cours de l’Orbe est un non sens absolu, puisque orba, ou ourba, signifie justement courbe !   
    
Cela n’a pas empêché l’homme de comploter ouvertement  contre cette liberté que cette belle rivière  eut depuis toujours d’aller son chemin à sa guise et sans que  personne ne la viole d’aucune façon.
   
   
Les projets ne manquèrent jamais dès le XIXe siècle où de vastes études se proposèrent de lui redresser le poil du lac à la frontière, avec même l’établissement d’une nouvelle trajectoire dont la rectitude serait gage d’une possibilité de navigation.
    En raison des coûts budgétisés par tous ces travaux, ceux-ci furent abandonnés.    
    Néanmoins, et malheureusement, on reprit le dossier à la fin des années cinquante pour passer à l’acte au début des années soixante et voir se réaliser ce qu’il avait plu à tous ces tenants du progrès de mettre sans cesse en perspective.  
  
    
Enfin l’Orbe se fraierait désormais un chemin selon la direction que l’on avait choisie. Les terres regagnées par l’élimination des courbes, permettraient l’installation de différents sites, la plupart sportifs, comme aussi de zones constructibles et industrielles.
  
   
L’homme avait gagné. La nature avait perdu, et surtout l’esthétique avait pâti lourdement d’un projet  sans nuance. Un désastre.
  
  
Les photos qui suivent le montreront à l’envi. L’Orbe désormais, sur le tronçon rectifié, ne présenterait plus qu’une rectitude déplorable et sans poésie aucune.
  
    
L’Etat de Vaud, qui probablement chapeautait l’entier du projet, n’a pas ici de quoi pavoiser.
   
   
Notre imprimeur local, journaliste à ses heures, Roland Dupuis, grand pêcheur sous l’Eternel, restait dubitatif face à ces gigantesques projets qui venaient ainsi bouleverser l’écosystème local. Peu convaincu, il devait cependant noter au terme de ses propos :
    
    
« De toutes façon c’est une page qui se tourne, ouverte au progrès dont les impératifs sont sans appel ».
     
   
On ne le sent nullement convaincu. Conclusion qu’en plus on pourrait mettre entre parenthèse, puisque on l’a vu depuis lors, et qu’on le verra très certainement encore, des rivières dont le cours autrefois réaménagé en des droites infâmantes,  ont été « retravaillées » dans le but de leur offrir à nouveau des courbes à la manière d’autrefois.
   
    Comme quoi rien n’est jamais définitif, ni dans un sens ni dans l’autre.