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22. Claire Martinet, L'Abbaye Prémontrée du Lac de Joux, des origines au XIVe siècle, 1994 - sans texte -.

Publié le 07 octobre 2013 dans Les classiques historiques de la Vallée de Joux

Couverture de l'ouvrage de Claire Martinet.

    Ouvrage préfacé par Claude Berney. Indispensable à qui veut rétablir la réalité de l'histoire. Car c'est ce qu'il faut comprendre, les sires de la Sarraz, peu assurés par les actes anciens authentiques de leur possession pleine et entière de l'abbaye du Lac-de-Joux, se résolurent à falsifier les documents en leur possession. Opération hautement répréhensible mais malheureusement pleinement réussie, puisque les faux qu'ils réussirent à glisser dans une masse documentaire considérable, allaient être pris pendant près de six siècles pour des vrais authentiques. 
    La chose quelque part pourrait être comique. Nous nous trouvions alors en possession de deux actes de 1186, dont l'un des deux était faux. Ces deux actes étaient connus. On les mettait en parallèle, et, toute bizarre qu'était la situation que ces deux textes différents créaient, on en arrivait pourtant à penser et à dire qu'ils ne se contredisaient pas ! Comme quoi l'historien est parfois drôlement retord ! 
    Faux de 1186 magistral, puisqu'il semblait introduire pour la première fois dans le parler ancien le terme de Pays de Vaud, alors que celui-ci, dans la réalité, n'apparut que deux siècles plus tard! Faux magistral sur lequel s'appuyait donc la plupart de nos historiens. L'histoire ainsi était en partie biaisée qui allait pourtant constituer l'officielle. Cette nouvelle étude fut donc la bienvenue pour remettre les choses en place et pour comprendre que les sires de la Sarraz, en une époque il est vrai où leur domination battait de l'aile et où la famille croulait sous les dettes, c'est alors qu'elle vendit la Vallée au duc de Savoie - 1344, date clé -, étaient devenus des voyous! Ce qui, dans le fond, ne changea rien au cours de l'histoire, puisque les mêmes furent toujours considérés et que leur rôle sur la Vallée ne fut jamais remis en question. L'histoire ne serait donc, à certain égard, qu'une approximation ? C'est ce qu'il faut probablement comprendre. 
    Le travail de Claire Martinet, est exemplaire. En ce sens déjà que l'auteur s'attache aux documents de base, les transcrit, compare et en arrive à ses conclusions que nos gentilshommes de la Sarraz, si on peut les traiter encore de cette manière, n'avaient pas fait dans la dentelle. 
    Comment avaient-ils procédé ? Simplement que le couvent de l'abbaye étant lui aussi dans la déliquescence en cette époque trouble, ils avaient prétendu remettre ses affaires en ordre, et pour ce faire, ils avaient confisqué toute la documentation alors à disposition. Une grande malle pleine de documents, dit la chronique. Et c'est en celle-ci qu'ils avaient pioché pour en extraire les documents les plus importants, et pour les faire falsifier à leur guise, travail accompli par quelque scribe marron qui ne la voyait peut-être pas fixe en cette opération délicate et bien entendu tout à fait discutable - la masse documentaire de l'époque monastique ne fut-elle pas dans son ensemble soumise à pareilles pratiques - mais qui néanmoins ne fut jamais inquiété. 
    Opération pleinement réussie. Bravo les faussaires. Heureusement, des historiens actuels veillent et magré les astuces de ces temps passés, savent la manière de procéder afin de découvrir leur parfaite malveillance. Surprenant! Décoiffant ! Et surtout obligeant à se remettre toujours en question.