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182. Pour une nouvelle visite de Romainmôtier.

Publié le 25 mai 2015 dans Voyages

Quand le ciel flirte avec les vieilles fenêtres de Romainmôtier.

    On y retourne volontiers. C'est que l'abbatiale nous attire mieux qu'un aimant, mieux qu'une bien aimée, mieux que l'Eldorado impossible. De la pierre, uniquement. Mais avec un charme étrange, calcaire du Jura grossièrement taillé. Et c'est ce qui lui donne précisément son charme. On la touche. On la trouve si belle et si émouvante qu'il nous arrive parfois de vouloir la bouffer! Rien qu'une image pour dire l'admiration de ce monument d'importance mondiale, n'ayons pas peur des mots. Et cela à la sortie d'un petit vallon, celui du Nozon, que l'on sait prendre naissance là-haut, au-dessus de Vaulion, au pied de falaises que l'on ne devine guère, cachées qu'elles sont par une épaisse végétation, une forêt de fayards superbes. 
    Romainmôtier, l'abbatiale certes, mais aussi la maison de la dîme, expositioin de Pierre Aubert à découvrir, et surtout le Prieuré. Grande maison sublime de vieillesse, restaurée sans l'abimer par la grâce des oeuvres de Katharina von Arx qui lui a consacré une bonne part de sa vie. Elle l'aimait au-delà de toute raison, la vieille bâtisse, qui, sans elle, eut connu des jours d'angoisse et de désespoir. Qu'en aurait-on fait ? On ne le sait pas. Imaginer qu'elle puisse disparaître, qu'on la démolisse, parce que ne servant plus à rien ? Impossible! 
    Elle est devenue partie intégrante d'un programme: La Clef de Voûte du Prieuré. Admirez l'orthographe: clef avec un f et non un vultaire é. C'est sublime! Autant que la bâtisse elle-même où plane encore, c'est certain, la présence des Bernois, de ceux-là qu'on venait trouver avec un fromage ou un  vacherin sous le bras pour les amadouer. Parfaitement, LL.EE. goûtèrent à notre fameuse pâte molle et semblent l'avoir appréciée. Comme ils aimaient aussi, ces sympathiques canailles, le chevrotin, le gruyère, les tommes, le beurre, le poisson... et tout le reste. C'était ce qui s'appelle graisser la pâte... de l'ours. Pour naturellement en obtenir quelque concession, ou leur suggérer de fermer les yeux sur une affaire un peu trouble! 
    Tout cela, c'est bien vrai, n'a pas disparu des lieux. Bien entendu ils ne sauraient y revenir. On les a quittés, pour la plupart, avec plaisir, sauf pour les gens de Romainmôtier qui coururent encore après leur dernier carrosse pour leur témoigner leur sympathie. Ils les aimaient, or donc. Il est des fois où on peut le comprendre. Lausanne ne fut en aucun cas meilleur. Quant à Napoléon, laissez-le où il se trouve, il vivait sur le dos des habitants. Il aimait imposer des taxes. Son armée de bons à rien coûtait cher. 
    Romainmôtier, c'est à coup sûr une bonne pinte d'histoire. Celle-ci vous saute à la figure. Vous rend culturel. Et cette petite cité apparamment sans importance, un point minuscule sur la carte, sait en plus vous offrir parfois, et même souvent de la bonne musique. On joue ainsi dans l'abbatiale, on joue dans quelque endroit privé, on joue encore dans la salle bernoise du Prieuré. Et c'est un régal.